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Sébastien en Chine 劉子劍在中國
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26 août 2014

Le professeur Papa

 Lors de la 13e édition du concours Pont vers le chinois pour étudiants à l’étranger, une ancienne finaliste malgache : Isaia Herimialy Ratsizakaina est revenue pour parler de son expérience du concours. Ce à quoi elle ne s’attendait pas, c’est que son professeur de chinois vienne la retrouver sur le plateau...

Isaia ne voulait pas participer au concours. Elle se décrit comme une jeune fille d’un naturel timide, plutôt réservée. Pourtant lors de l’interview, nous avons pu voir qu’elle est aujourd’hui une jeune fille épanouie, souriante et confiante. D’où vient ce changement ? Certainement de l’aide d’un de ses professeurs de chinois : M.Huang, professeur de chinois à Madagascar. Celui qu’elle appelle « professeur Papa » .

M.Huang est un professeur de l’École normale du Jiangxi. En 2010, il a été envoyé comme volontaire à Madagascar pour enseigner le chinois. C’est là-bas qu’il a rencontré Isaia. À l’époque, Isaia faisait du chinois, mais c’était un pis-aller. Elle n’avait pas pu entrer dans l’université qu’elle voulait. Sa mère lui avait lors proposée de l’inscrire à des cours de chinois pendant un an, en attendant d’aller faire des études au Maroc avec une bourse. Sa mère et elle n’avaient pas imaginé que le chinois allait lui faire prendre une route radicalement différente.

Un professeur de vie

En 2011, lorsqu’elle commence le chinois, Isaia entre dans la classe de M.Huang. Personnage plutôt sévère d’apparence, M.Huang est effectivement très exigeant avec ses élèves. Isaia qui à l’époque était un peu perdue, et empêtrée dans des problèmes familiaux, finit par aimer ce professeur qui s’inquiète pour ses élèves et leur donne les chances de s’améliorer en mettant la barre très haut. « Mes exigences pour tous les élèves sont les mêmes, mais si je me rends compte que la capacité d’un élève est plus grande, alors je lui donne des devoirs, des choses à faire en plus. Je ne veux pas laisser quelque chose qui peut être exploité dépérir. J’ai vu de grandes capacités en Isaia même si elle ne s’en rendait pas compte à l’époque. » Un peu timide devant la déclaration de son professeur, Isaia répond que « M.Huang était pour moi comme un professeur de vie, il m’a appris énormément. On est tellement proches que je l’appelle Professeur Papa. »

À raison d’une vingtaine d’heures de cours par semaine le matin et de cours culturels l’après-midi pendant un an et grâce à une capacité innée pour l’apprentissage des langues étrangères (elle parle couramment français, anglais et chinois), Isaia progresse très vite et devient vite « la fille adoptive » de M.Huang. Il décide de la prendre sous son aile et rêve même de la voir devenir l’interprète personnelle du président malgache ! C’est dire si M.Huang avait vu le potentiel d’Isaia.

Le chinois, une échappatoire

Pour cette dernière, le chinois, qui était un pis-aller, devient donc le moyen de s’en sortir, de trouver un nouveau sens à sa vie. Peu avant le concours en été, elle part en Chine à Nanchang dans la province du Jiangxi pour participer à une session d’étude. C’est là que le concours apparaît dans l’histoire d’Isaia. M.Huang propose à Isaia de présenter le concours de chinois en 2012. Il a vu qu’elle avait les capacités pour la compétition et qu’elle pourrait y obtenir une bonne place. Mais, Isaia refuse. M.Huang, qui commence à connaître un peu son caractère, ne lâche pas : « J’ai senti qu’il ne fallait pas être dur avec elle, mais lui donner confiance. Je lui expliqué que c’était une occasion importante, qu’elle ne devait pas la perdre. Je savais qu’elle avait largement le niveau et la bonne attitude pour participer au concours. »

Mais Isaia a peur de ne pas être à la hauteur. « Je n’avais qu’un an de chinois derrière moi et je ne voulais pas faire honte à mon pays ». Elle bloque. Mais petit à petit, la stratégie de M.Huang prend racine, Isaia accepte, après de longues discussions, de participer. Elle est retenue parmi la centaine de candidats finalistes pour partir en Chine.

La révélation

Première candidate malgache à participer au concours, elle arrive à rentrer dans les finalistes et devient même la représentante du continent africain parmi les cinq finalistes pour l’édition de cette année-là . Elle a du mal à réaliser, avoue-t-elle. Depuis Madagascar, M.Huang essaye tant bien que mal de suivre le concours car l’Internet ne marche pas très bien. « J’écrivais régulièrement des textes pour raconter son concours ou son histoire à Madagascar. »

Lorsqu’elle retourne à Madagascar, M.Huang est déjà rentré en Chine, il a finit ses années de bénévolat. Ils ne se revoient donc pas. Isaia rentre à Madagascar en héroïne. Elle est même accueillie par un membre du gouvernement malgache. Plusieurs organismes où le chinois est enseigné l’invitent à venir parler de son expérience. Elle est interviewée par plusieurs magazines malgaches. « J’ai été accueillie à l’aéroport, interviewée. J’avais l’impression d’être une superstar, mais c’était trop », ajoute-t-elle modestement.

Elle décide de ne plus partir au Maroc et de continuer ses études de chinois. Puis, grâce à la bourse qu’elle a reçue après ses qualifications dans le concours, elle s’envole pour la Chine. Elle va à  l’Université des Langues de Beijing. Elle y est actuellement pour une licence de politique internationale.

Les perspectives de travail sont nombreuses, à Madagascar, que ce soit dans le commerce ou la politique, il y a beaucoup à faire pour les relations avec la Chine. Mais pour le moment, son rêve c’est de travailler en Chine. Elle espère aussi pouvoir changer la vision qu’ont les Chinois de Madagascar soit pauvre et sous-développé ou soit très idéalisée à cause du dessin animé Madagascar.

Retrouvailles

Pendant ces années-là, elle a pensé à M.Huang, son mentor et celui qui lui a donné l’occasion d’arriver là où elle est aujourd’hui. Mais malheureusement, à cause de la distance ils n’ont jamais pu se revoir après le concours de 2012. C’est donc un prétexte très simple qu’a utilisé l’équipe du programme télévisé pour les faire se retrouver. Ils ont invité Isaia en lui faisant croire qu’elle venait pour témoigner de sa participation au concours. Et ils ont fait venir M.Huang en douce. « J’aurais vraiment voulu la voir avant la soirée, mais l’équipe télé me l’a interdit. J’avais aussi consigne en montant sur scène de porter des chaussures qui ne font pas de bruit ». Isaia réplique en disant : « Je ne savais vraiment pas qu’il était là, et je ne comprenais pas pourquoi l’équipe télé m’avait dit de regarder droit dans le public et la présentatrice ne me regardait pas pour parler... »

M.Huang est donc arrivé doucement de l’arrière-scène après la diffusion de la séquence souvenir. Il lui avait apporté un dictionnaire de chinois comme cadeau et avec un ton très paterrnel lui a dit : « Tu as encore beaucoup à apprendre, ce dictionnaire te sera utile pour bien apprendre le chinois. »

 

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